
Le waqf, élément fédérateur et catalyseur
Mosadeq Sahebdin
Co-Directeur
Awqaf (Mauritius) Foundation
L’état d’abandon du marché Muhammad Ali Jinnah, à Plaine Verte, avec une espace centrale sous-exploitée et des emplacements commerciaux occupés par quelques survivants, tandis que d’autres sont carrément fermés, permet de croire que c’est le résultat d’un acte de sabotage délibéré, voire cynique, pour priver une centaine de commerçants la possibilité d’y opérer et de faire prospérer leurs familles.
Ailleurs, l’état de décrépitude du bâtiment du Harbour Front, communément appelé, à tort, Bâtiment Wakaf, devait nous fendre le cœur, surtout qu’appartenant à une association musulmane, il n’apporte rien à la communauté, mais abrite, d’une façon dégoûtante, un restaurant où des produits illicites sont vendus chaque jour. Dans le même registre, une autre propriété, à Curepipe, waqf celle-là, donc appartenant à Allah (swt), est sous-exploitée, abritant quelques commerces, dont trois restaurants, où l’alcool et le porc sont vendus à gogo.
Gardons-nous de pointer du doigt, à ce stade, les responsables de cette situation, qui prive des citoyens, qui ne demandent qu’à vivre librement, de la possibilité de renforcer les capacités de la communauté et de créer, dans la foulée, de la richesse pour l’Ummah.
“Et préparez contre eux tout ce que vous pouvez comme force et comme cavalerie équipée, afin d’effrayer l’ennemi d’Allah et le vôtre, et d’autres encore que vous ne connaissez pas en dehors de ceux-ci, mais qu’Allah connaît. Et tout ce que vous dépensez dans le chemin d’Allah vous sera remboursé pleinement et vous ne serez point lésés. Surah Al Anfal (8) verset 60
Dans ce verset, Allah (swt) nous demande de nous préparer, de rester en état de préparation à tout moment, pas que militairement, mais aussi économiquement. Il nous demande aussi de préparer la cavalerie, autrement dit: de construire le pouvoir économique. Sans pouvoir économique, on est incapable.
Sur un autre plan, il est presque impossible, voire difficile, au vu des invectives et des propos hargneux qui s’échangent sur les mimbars, de part et d’autre, propos justifiés par des pseudo-prêcheurs selon leur appartenance à telle ou telle école de pensée, de fédérer la communauté musulmane autour d’un projet de société.
Il existe cependant, car Allah (swt) et Son Messager (saw) n’ont laissé rien au hasard et ne permettra pas aux savants porteurs de visières de nous détruire. Il existe donc un élément fédérateur indéniable, un catalyseur puissant, au-delà des actes d’adorations communes. Et ce catalyseur s’appelle le waqf.
Le Waqf est une composante importante des instruments économiques islamiques qui, incontestablement, peuvent résoudre les problèmes socio-économiques, principalement par la mise en œuvre de mesures tendant à éradiquer la pauvreté.
L’Islam est une religion de solidarité et de coopération entre les différentes couches de la société islamique. Le système économique islamique dispose d’un puissant modèle de solidarité qui est apparu à l’époque du prophète Muhammad (saw) et a évolué pour devenir une institution appelée Al Waqf. Aujourd’hui, les musulmans se doivent de reconnaître que les instruments financiers islamiques offrent de nouvelles opportunités de développement pour le concept de Waqf.
Muhammad (saw) a pu, en formulant et appliquant la Charte de la fraternité et de la tolérance, dès la création de l’état à Madina, rallier les diverses tribus qui étaient à l’époque à couteaux tirés, en plus de pouvoir faciliter l’intégration des Mouhajiroun dans la société médinoise. Outre l’élément fondamental de l’aqeeda, à ne pas confondre avec les écoles de pensée, Muhammad (saw) encourage des initiatives économiques fondées sur le concept du waqf. Le waqf d’Uthman ibn Affan (r.a) dont on connaît l’essor fantastique et sa présence et son impact au sein de Madina à l’heure actuelle est le meilleur exemple qui soit. Celle d’Umar ibn al Khattab ne démérite pas.
Le succès de ces initiatives ont démontré que les clivages hostiles n’avaient plus sa raison d’être et pouvaient et avaient pu être vaincues par des actions solidaires, par le biais, en partie du waqf.
Il incombe à la communauté, en s’appuyant sur le cadre légal mauricien de donner une nouvelle impulsion à cette institution. L’initiative volontaire à travers le Waqf permet de mettre en marche un moteur de création de richesse et le Waqf en tant que véhicule perpétuel possède les atouts pour adresser plusieurs enjeux sociétaux.
Il est certain que, quand vous vous associez à quelqu’un pour initier un partenariat commercial ou agricole, vous ne recherchez pas, en premier, l’école de pensée de cet associé potentiel. Vous ne recherchez pas quel groupe sociodémographique il provient. Car, le waqf transcende toutes ces considérations frivoles et divisionnistes. Le waqf est un pilier économique qui permet la création de la richesse pour l’Ummah, la création d’emplois et l’allègement de la pauvreté.
L’Awqaf (Mauritius) Foundation, encore à l’état de balbutiements, reçoit, en ce moment des appels de frères et sœurs ne voulant pas rater l’occasion de faire plaisir à Allah (swt) et de récolter des sawab e jariyah. Ils ont compris les enjeux de la société et ne veulent pas se laisser entraîner dans des querelles sectaires, avec des visières. Ensemble, nous pouvons construire, avec l’aide d’Allah (swt) une Ummah forte et durable.
Qu’Allah (swt) nous guide et nous aide.